Un immeuble de standing, avenue Kleber.
Franck Samson reçoit dans les bureaux du cabinet Samson&Associés.
« C’est pour quelle radio déjà ? Parce que j’ai une
autre interview tout à l’heure… » L’avocat est sur le
pied de guerre. « Je vais à Leipzig pour y affronter pas mal
d’armées ! Et je ne sais pas si je vais gagner ou perdre la
bataille ». Ce spécialiste du code de la route a rendez-vous
avec l’Histoire. Dans quelques jours il conduira des milliers
d’hommes au combat, en découdre avec Alexandre 1er de Russie et l'armée prussienne. Franck Samson est Napoléon Bonaparte. « Je me suis toujours
passionné pour l’histoire, et je collectionnais les uniformes
napoléoniens. Un jour des figurants étaient à court d’empereur
pour reconstituer la Bataille des Nations. Je tombais à pic. C’était
il y a dix ans ». Depuis, chaque année au mois d’octobre,
Franck Samson troque sa robe d’avocat pour la redingote et le
chapeau. Leipzig donc, mais aussi Austerlitz, Waterloo, Saint-Hélène…
De reconstitution en commémoration, son association « Empire
1804 » rejoue en costume l’épopée napoléonienne. « Pour
faire ce devoir de mémoire. Nous attendons plusieurs milliers de
spectateurs à Leipzig, et toute personne aimant l’histoire
appréciera de revivre la Bataille des Nations ».
18 octobre 1813, au petit matin. Napoléon
Bonaparte affronte l'Europe entière devant Leipzig. Ce sera la plus grande bataille jamais
livrée par l’Empire (600 000 soldats, une douzaine de nations
belligérantes, des dizaines de milliers de morts) et la première
défaite d’une armée sous le commandement personnel de Napoléon.
Retranché dans la ville face à l'ennemi coalisé (Prusse, Russie, Autriche, Suède), trahi par ses alliés saxons, l’Empereur
français sonne la retraite. Celle-ci est mal préparée et se
transformera en débâcle. Napoléon doit franchir le Rhin en
catastrophe, c’est la fin de l’occupation des territoires
allemands et l’amorce de son déclin. 1813
– 2013, Leipzig fête cette année son bicentenaire.
En Allemagne, l'événement revêt une certaine importance : la « Völkerschlacht » y est restée un marqueur historique fort, qui
porte en lui les germes de la future unité allemande. La bataille
est moins célèbre du côté français, éclipsée dans les manuels
scolaires par la défaite de Waterloo.
Franck Samson, lui, mesure
parfaitement l’enjeu de Leipzig. Et ne laisse rien au hasard :
« Dans la reconstitution, on doit s’atteler à être le plus
fidèle possible. J’ai lu beaucoup de biographies
et je reproduis certains détails, comme le tic de tirer sa manche. Je
me mets en colère régulièrement - Napoléon était assez colérique
- et j’apprends le corse…» Ce qui le
fascine chez Bonaparte ? « Le génie militaire et le génie
civil. Il arrive en France à l’âge de 7 ans sans parler un mot de
français et en 1810, il est le maître du monde. Ca ne peut être
que fascinant. » Quant à Blücher, le général prussien :
« Un ami ! Et surtout un sosie absolu, d’ailleurs je ne
connais même pas son nom dans la vraie vie. » De la fiction-histoire à la réalité il n’y a qu’un pas, se dit-on en remontant
l’avenue Kleber vers l’arc de Triomphe. A droite, l’avenue
d’Iéna. Franck Samson n’a pas choisi son adresse au hasard.